Le réseau électrique, catalyseur de notre avenir énergétique

La Suisse doit procéder à une transformation fondamentale de son système énergétique pour atteindre ses objectifs énergétiques et climatiques. Dans ce contexte, l’électricité jouera un rôle encore plus important dans l’approvisionnement énergétique de demain: les énergies renouvelables, la flexibilité, l’amélioration de l’efficacité, l’électrification et le couplage des secteurs seront les principaux leviers d’une action qui aura lieu pour l’essentiel sur le réseau électrique. Cette artère vitale de l’approvisionnement énergétique doit maintenant continuer à être développée afin de créer les bases nécessaires à la transformation du système énergétique.

Ce qu’il faut savoir

  • Le réseau électrique est l’artère vitale de l’approvisionnement énergétique et le catalyseur de la stratégie énergétique et climatique de la Suisse.
  • Le changement fondamental du système énergétique met le réseau électrique sens dessus dessous. Afin de pouvoir relever les nouveaux défis, il doit être encore développé, modernisé et étendu.
  • Les procédures visant à poursuivre le développement de l’infrastructure de tous les niveaux doivent être accélérées et des mesures doivent être prises pour garantir une exploitation sûre et efficace du réseau.
  • Début 2024, l’AES présentera, conjointement avec l’EPF de Zurich, une étude sur les réseaux de distribution qui exposera des solutions pour la poursuite de leur développement ainsi que les coûts de différents scénarios d’extension.

Les objectifs énergétiques et climatiques de la Suisse nécessitent une transformation fondamentale de son système énergétique. Dans ce nouvel univers énergétique dynamique, les producteurs centralisés et décentralisés, les dispositifs de stockage centralisés et décentralisés et les consommateurs connus et nouveaux doivent pouvoir fonctionner ensemble et simultanément. En raison de la décarbonation, davantage de courant qu’aujourd’hui devra être produit et, surtout, il y aura beaucoup plus d’électricité issue de la production décentralisée, p. ex. provenant d’installations photovoltaïques sur les toitures et les façades, qui sera injectée dans le réseau de distribution. De plus, les (nouveaux) consommateurs nécessitant une puissance élevée, comme les véhicules électriques et les pompes à chaleur en augmentation, peuvent entraînent des pics de charge élevés qui placent l’exploitation sûre du réseau face à un grand défi.

Le réseau d’aujourd’hui doit continuer à être développé afin de pouvoir surmonter les défis d’un système énergétique transformé et continuer à être maintenu constamment stable. Poursuivre le développement, cela signifie être modernisé, digitalisé et étendu si nécessaire. En rendant le réseau plus intelligent et flexible, les nouvelles technologies contribueront à limiter l’extension, onéreuse, du réseau au strict nécessaire. Il faudra en outre une participation active de la clientèle : elle aussi contribuera, main dans la main avec les gestionnaires de réseau, à la mise en place d’un système énergétique efficace et sûr.

Position de l’AES : faire du développement et de la digitalisation des réseaux électriques une priorité

Les réseaux électriques sont étrangement ignorés dans les discussions politiques sur l’avenir énergétique de la Suisse. Il faut que cela change. Le développement du réseau électrique doit aller de concert avec celui de la production d’électricité renouvelable. S’il n’y a pas de lignes, la production des nouvelles installations ne peut pas non plus être acheminée jusqu’aux consommateurs. Il faut donc accélérer le rythme et les procédures, pour le développement de la production d’électricité renouvelable comme pour celui du réseau électrique.

La décarbonation se déroule en particulier dans le réseau de distribution : production décentralisée, bornes de recharge pour l’électromobilité, flux d’électricité modifiés. Si la digitalisation fait partie intégrante de la solution et facilite l’optimisation du système, elle nécessite également une protection accrue contre les cyberattaques, qui exigera des investissements considérables dans le réseau au cours des années à venir. Une gestion intelligente de l’injection et de la consommation permettra de réduire l’extension coûteuse du réseau de distribution. Cela suppose toutefois que les clients unissent leurs efforts. Il doit notamment être possible de les inciter à adopter un comportement en faveur du réseau, par exemple par une tarification appropriée, et le gestionnaire de réseau doit pouvoir limiter l’injection ou le prélèvement d’électricité sur le réseau en fonction de la situation.

Le réseau de transport permet l’échange d’électricité suprarégional et transfrontalier. Il doit garantir que la production future, qui sera notamment générée dans les Alpes (hydroélectricité/photovoltaïque) et dans l’Arc jurassien (énergie éolienne), puisse être acheminée vers les centres de consommation du Plateau. La stabilité du système, qui est assurée dans le réseau de transport, exige la prise de mesures pour être garantie dans le temps. L’absence d’accord sur l’électricité se fait également sentir ici, car elle rend le maintien de la stabilité du réseau de plus en plus difficile (voir le dossier «Accord sur l’électricité»).

Mesures nécessaires pour un réseau électrique d’avenir

  • Garantie de la capacité d’investissement dans la transformation, l’extension et la digitalisation des réseaux: conserver la méthode et les valeurs limites du WACC; abandonner la régulation incitative.
  • Protection des infrastructures de réseau critiques de tous les niveaux contre les cyberattaques: continuer à développer les normes de la branche.
  • Exploitation sûre et efficace du réseau de transport: garantir la sécurité juridique en cas de délestage manuel; prendre des mesures côté réseau pour assurer la sécurité d’approvisionnement et la stabilité du réseau à court et moyen terme; viser la conclusion d’un accord sur l’électricité.
  • Exploitation sûre et efficace du réseau de distribution: créer une marge de manœuvre pour la tarification du réseau; introduire la possibilité de gérer la charge et l’injection ainsi que la possibilité du peak shaving. Ce dernier doit être introduit dans le cadre du Mantelerlass.
  • Smart Grid: permettre le pilotage basé sur les données pour les réseaux de distribution, automatiser les processus et accélérer/mettre en œuvre le déploiement des smart meters (sans libéralisation du système de mesure, décidé ainsi dans le Mantelerlass).
  • Accélération de la transformation et de l’extension de l’infrastructure de réseau: traiter de manière identique les centrales électriques, les lignes de raccordement et les renforcements de réseau concernant l’accélération des procédures à tous les niveaux de réseau (mêmes délais, processus, procédures pour la Confédération, les cantons et les communes).

État des lieux: accélération des procédures aussi pour le réseau

Dans le Mantelerlass adopté par le Parlement (voir le dossier), du point de vue du réseau de distribution, la renonciation à la libéralisation du système de mesure et l’introduction de la possibilité du peak shaving sautent particulièrement aux yeux, positivement. Des mesures politiques s’imposent au niveau de la tarification du réseau et de l’utilisation des flexibilités en faveur du réseau – deux conditions préalables centrales pour organiser les besoins d’extension du réseau de distribution le plus efficacement possible et à moindre coût. Cette occasion a été manquée dans le cadre du Mantelerlass.

Avec le projet d’accélération soumis au Parlement en juin 2023, le Conseil fédéral propose des mesures qui visent à accélérer les procédures d’autorisation portant sur des projets axés sur des énergies renouvelables. Le projet d’accélération concerne également les réseaux de transport d’électricité (niveau de réseau 1). À l’avenir, un corridor de planification sera directement défini dans le cadre de la procédure du plan sectoriel (au lieu de commencer par une zone de planification comme jusqu’à présent). L’orientation proposée dans le projet de loi pour l’accélération des procédures présenté par le Conseil fédéral est juste.

Il importe que l’accélération ne s’applique pas seulement aux installations de production renouvelables d’intérêt national, mais qu’elle soit aussi étendue en particulier aux raccordements et aux lignes nécessaires côté réseau, aussi bien dans le réseau de transport que dans le réseau de distribution. Une installation de production ne sert à rien s’il n’y a aucun raccordement ou que les capacités de réseau ne suffisent pas pour transporter l’énergie. L'AES salue expressément le fait que le Conseil fédéral ait mandaté un autre projet qui aborde de manière globale les procédures d'autorisation dans le domaine des réseaux et qui prend surtout en compte tous les niveaux de réseau.