
Concernant l’approvisionnement en électricité pendant l’hiver, un grand journal suisse a récemment écrit que le pétrole était «la dernière ligne de défense de la civilisation». Sérieusement? N’avons-nous plus d’autre solution que de brûler des énergies fossiles tout en sachant que ce n’est pas ainsi que nous sauverons la civilisation… mais bien que nous continuerons à détruire les bases de son existence?
Le défaitisme ne nous mènera nulle part – nous préférons nous tourner vers l’avenir avec entrain. Là, il y a une bonne nouvelle, et une nouvelle un peu moins bonne. D’abord la bonne: depuis que les résultats de notre étude «Avenir énergétique 2050» ont été communiqués le 13 décembre dernier, nous savons, base scientifique à l’appui, que nous pouvons atteindre nos objectifs énergétiques et climatiques tout en garantissant l’approvisionnement. La moins bonne nouvelle, c’est que cela ne tombera pas du ciel. Le résultat de notre étude est sans appel: avec les conditions-cadre actuelles, nous n’y arriverons pas. Quel que soit le scénario, la sécurité d’approvisionnement ne peut être garantie que si nous donnons un véritable coup d’accélérateur, et ce dès aujourd’hui et sur plusieurs décennies.
Alors, concrètement, qu’est-ce que cela signifie? En premier lieu, que la sécurité d’approvisionnement doit être la priorité n° 1 et considérée d’intérêt national – même face à des revendications environnementales et liées au paysage lorsqu’il faut procéder à une pesée des intérêts. Le développement de toutes les énergies renouvelables indigènes doit réellement progresser afin d’empêcher une dépendance aux importations d’électricité encore plus forte. La Suisse ne doit pas pour autant se précipiter dans une autarcie, ce qui serait une pure folie sur le plan économique. Afin d’être en mesure d’échanger efficacement de l’énergie avec nos voisins, nous devons cependant parvenir à un accord avec l’UE, qui contribuerait à garantir la stabilité du réseau et simplifierait les futures importations d’électricité et d’hydrogène. Enfin, il faut un changement de paradigme, à savoir passer d’une législation sur l’approvisionnement en électricité à une législation sur l’approvisionnement en énergie qui tienne compte du couplage des secteurs – et il faut aussi établir des marchés de flexibilité et d’efficacité.
Conclusion: Yes we can! Mais nous devons maintenant littéralement décupler nos efforts pour développer la production, améliorer nettement l’efficacité, transformer et étendre les réseaux, et collaborer avec nos voisins européens.
Remettre le destin de notre civilisation entre les mains du pétrole ou le prendre nous-mêmes en main? Le choix nous appartient.
La plume politique
À la rubrique «La plume politique» du magazine de la branche Bulletin, Dominique Martin, Responsable Affaires publiques à l’AES, publie régulièrement ses commentaires et ses appréciations sur des thèmes de politique énergétique.