La fin des concessions hydrauliques: risques et opportunités

Les centrales valaisannes produisent à elles seules presque 30% de l’hydroélectricité suisse. De nombreuses concessions importantes arrivent à échéance dans 20 à 25 ans. La fin des concessions soulève de multiples questions économiques, juridiques, environnementales et de politiques publiques. La 9e édition de la Journée de l’Energie, renommée Rendez-Vous de l’Energie à Martigny dans le cadre de la Foire du Valais était consacrée à ce sujet.
04.10.2019

Les concessions d’exploitation des grands barrages vont arriver à échéance progressivement ces prochaines années et décennies. Les communes concédantes valaisannes auront des décisions importantes à prendre au sujet de l’auto-utilisation de leurs ressources hydrauliques ou, si elles y renoncent, au sujet de l’octroi de nouvelles concessions et du partage des risques et opportunités avec le Canton et d’autres acteurs du marché.

Cadre légal

Joël Fournier, chef du Service de l’énergie et des forces hydrauliques, a présenté le cadre légal et le processus prévu dans la loi valaisanne. En vertu de la Loi fédérale sur l’utilisation des forces hydrauliques (RS 721.80), à l’échéance de la concession, les ouvrages reviennent en principe aux collectivités concédantes. Fin 2016, le Grand Conseil valaisan a adopté une nouvelle loi qui permet au canton du Valais de garder au moins 60% de la production hydroélectrique en mains publiques. Selon le modèle de base, les communes concédantes conservent 30% des installations et cèdent 30% à un prix «solidaire» au Canton. Ce dernier cèdera ensuite sa participation aux Forces motrices valaisannes (FMV) à des conditions de marché. Les 40% restants pourront être vendus, notamment à des entreprises électriques privées.

Alpiq

Michael Wider, Head Generation Switzerland, Alpiq SA, a interrogé le rôle de l’industrie hydraulique et son modèle d’affaires dans le futur. Dans 20 à 25 ans, le contexte aura changé: l’électrification croissante, l’évolution de la mobilité et des conditions climatiques ne favoriseront pas une diminution de la consommation d’électricité. Les caractéristiques du marché futur influenceront les conditions de l’hydraulique. Des énergies de substitution vont éventuellement affaiblir l’hydraulique, dont les coûts fixes sont élevés. Selon lui, il faudra envisager d’autres structures et des variantes différentes. Le besoin de financement externe sera toujours nécessaire. La redevance hydraulique joue également un rôle important. Elle doit également faire partie des discussions autour des renouvellements de concessions. Un partenariat sera bénéfique pour répartir les risques politiques, techniques, commerciaux et énergétiques. Avec ses hautes écoles et des partenaires comme Hydro Exploitation, le Valais dispose des atouts nécessaires pour réussir, même à un niveau international. L’appréciation du risque et la prise de risque va déterminer le rôle des partenaires dans le futur.

Damien Métrailler, président de l’ACC (Association des communes concédantes du Valais), qui regroupe 83 des 86 communes concédantes, dont 39 en Valais romand et 44 en haut Valais, a exposé les perspectives des communes. De nombreuses communes ont considéré la redevance comme une recette fiscale jusqu’à maintenant. Si elles deviennent partenaires de l’aménagement, elles deviendront aussi partenaires des risques. Il propose donc de commencer à capitaliser une partie des montants reçus et de créer un fonds. Il faudrait également s’approprier des compétences techniques, juridiques et économiques. Est-ce que les communes veulent et peuvent développer des compétences techniques en lien avec l’exploitation? Selon lui, il faudra faire confiance aux différents partenaires et faire preuve de clairvoyance. À part dans les petits ou les moyens aménagements, l’implication directe des communes pourrait être limitée. La collaboration passe par les distributeurs. Les communes ont un droit de participation, mais il faudra laisser la commercialisation et la distribution aux partenaires industriels.

Comment industrialiser une vision politique?

Pour Paul Michellod, directeur général FMV SA, le droit de retour est à comparer à un héritage. Il s’agit d’abord de comprendre quelle était la volonté des prédécesseurs lorsqu’ils ont mis en place les concessions. Ensuite, il faut baliser le chemin vers le renouvellement des concessions. Une segmentation des aménagements est nécessaire; certains sont systémiques. Avec ses capacités installées de production le Valais a un rôle important à jouer dans cette transition. Les partenaires concernés doivent travailler ensemble et trouver des concepts novateurs dans une réflexion globale et interdisciplinaire. De la créativité est demandée. Le contexte valaisan est à structurer. Une harmonisation de la mosaïque actuelle avec un point de départ cohérent et une consolidation des intérêts dans le canton sont indispensables.